Le week-end dernier, votre média local et indépendant « le Ch’ni » et l’association « Espoir et Fraternité Tsiganes de Franche-Comté » se consacraient à traiter de la question des « gens du voyage ». L’occasion d’une conférence-débat, mêlant histoire et cas pratiques, le vendredi 25, puis des visites dédiées, à la saline royale d’Arc-et-Senans et auprès de la famille Meyers, avec la députée Ersilia Soudais, durant la journée du samedi 26.
Conférence-débat sur l’anti-tsiganisme
Le vendredi 25 octobre de 18h00 à 20h00, une conférence-débat était organisée à l’amphithéâtre Petit de la faculté de Lettres. Devant une quarantaine de personnes, les deux intervenants ont pu longuement aborder la question des « gens du voyage ». Un terme administratif générique, recouvrant en réalité un très large éventail communautaire, ethnique, culturel, linguistique et religieux de voyageurs et voyageuses. L’occasion de parler histoire, quotidien et discriminations.
Rémy Vienot est ainsi revenu sur l’association « Espoir et Fraternité Tsiganes de Franche-Comté », qu’il mène depuis 2013 afin d’aider les populations en difficultés sur la région et au-delà. Un présent articulé en écho du passé, achevant ses paroles par la lecture d’un texte poignant. Reprenant le fil, Ritchy Thibault, militant des Droits humains, a quant à lui livré bien des éléments sur les camps d’internement, les livrets de circulation ou l’implantation des « aires d’accueil ».
Ersilia Soudais, députée LFI de Seine-et-Marne, a également exposé son engagement parlementaire à ce sujet, motivant sa venue à Besançon. Coprésidente du groupe d’étude dédié à l’Assemblée Nationale et souhaitant une proposition de loi visant à reconnaître le génocide Rom durant la Seconde Guerre mondiale, elle a avancé ses projets, ses interrogations, mais aussi ses limites, dans une action publique délicate à concrétiser sans prise de conscience politique et populaire.
Dans un temps de dialogue avec le public, les prises de parole ont été fortes. À l’instar de l’ancien adjoint au maire de Dannemarie-sur-Crète, Jean-Claude Forestier, qui a relaté son combat, parfois contre élu·e·s et habitant·e·s, afin que sa commune considère ces citoyen·ne·s. Une militante des « Soulèvements de la Terre » soulignait aussi la convergence des luttes à travers la ZAC de Marchaux, dont l’aménagement aurait des répercussions sur la venue de familles.
Une visite parlementaire, entre mémoire et actualité
Le samedi 26 octobre en matinée, rendez-vous était pris à la Saline Royale d’Arc-et-Senans. À la suite de quelques baraquements en forêt de Chaux, le site fut un camp d’internement tsigane de septembre 1941 à septembre 1943 ; pour les près de deux cents détenu·e·s, parcage, disette, maladies, étaient la norme. Après le dépôt d’une fleur sur la plaque commémorative fixée en 1999, Rémy Vienot et Ersilia Soudais ont fait le tour du site pour en reprendre les réalités.
La journée s’est poursuivie autour de la famille Meyers, installée depuis vingt ans sur un terrain de Ranchot. Admis·e·s par la municipalité et les riverain·e·s, leurs membres n’ont toutefois jamais pu officialiser la situation. Certes les redevances ont toujours été acquittées, leur permettant de bénéficier d’un raccordement électrique provisoire dans l’attente d’eau courante. Mais en essayant de réguler les choses, tout s’est dernièrement précipité jusqu’au risque d’expulsion.
Une issue inenvisageable pour Rémy Vienot, qui a donc plaidé cette cause auprès d’Ersilia Soudais. D’autant plus qu’il ne reste que Jean-Claude, 75 ans, et Arlette, 76 ans, couple qui espérait pouvoir couler des jours heureux. Mais l’émotion suscitée semble d’ores-et-déjà avoir porté ses fruits, puisque la Mairie apparaît déterminée à maintenir la discussion et a exclu tout recours à la force. Un dossier définitivement rocambolesque, ainsi que le rapportait « France 3 ».
L’affaire symbolise les crispations persistantes, qui puisent à nouveau dans des archives parfois récentes. Arlette Meyers, dite « Cocotte », nous présentant ce qui fut son livret de circulation, dont le dernier tampon remonte à 2013. Une année qui marque la fin de cette mesure spécifique, avec l’octroi d’une carte d’identité et l’accession au droit de vote. C’était il y a tout juste dix ans, mais, aujourd’hui, bien des avancées restent à arracher, dans les pratiques et les mentalités.
Image d’en-tête : Rémy Vienot et Ersilia Soudais, lors du dépôt de fleurs sur la plaque commémorative de la Saline Royale d’Arc-et-Senans.