Mercredi soir à la Maison du Peuple, le sociologue Nicolas Renahy est venu présenter son dernier livre « Jusqu’au bout – Vieillir et résister dans le monde ouvrier » (la Découverte, 2024) devant une soixantaine de personnes. L’ouvrage plonge chez les ancien·ne·s de Sochaux, ces petites mains du « baby boom » qui travaillaient à « la Peuge ». Une introspection générationnelle singulière, questionnant les tenants et aboutissant d’un « vieillissement physique et social dans le monde ouvrier ». À ses côtés, outre Georges Ubbiali, sept manœuvres de Peugeot, quatre retraité·e·s et trois en poste.
Toutes et tous ont pu développer leurs ruptures et continuités, dans la vie professionnelle mais aussi militante. Un bouleversement, dessiné à travers ces regards croisés nostalgiques des grands mouvements salariaux. « Avec l’externalisation, la séparation des activités et des postes est la règle. Au sein de l’usine même, il ne reste plus grand monde, entre les cadres et les équipiers/équipières qui ne produisent que quelques pièces. Ces derniers/dernières sont d’ailleurs totalement dévolus à la chaîne, sans autre horizon qu’une cadence à 65/66 véhicules à l’heure ! » expose l’une.
« Les statuts, intérimaires/CDD, et les barrières, comme l’individualisation ou la langue, ont fait le reste. C’est difficile de faire comprendre à un collègue qu’on se bat pour dix minutes de pause, quand lui a dû survivre à une guerre » renchérit un autre. Le syndicalisme est aussi analysé, la conscience de classe s’amenuisant. « Le démantèlement de nos centrales et de nos sites sous Sarkozy/Hollande, c’est aussi la volonté d’achever des foyers de contestation. Les jeunes ne sont peut-être pas moins mobilisé·e·s, mais différemment. Dans ce nouveau monde, ça n’a rien à voir avec ce qu’on a vécu ».
Illustration d’en-tête : Aperçu de la tribune, avec, au centre, Nicolas Renahy et Georges Ubbiali.