Le 23 juin dernier, la municipalité de Besançon procédait à la levée d’un drapeau palestinien devant quelque deux cents personnes. Un acte symbolique fort, engagé par la maire Anne Vignot, rappelant à cette occasion son attachement à un processus de paix et au respect du droit international. Que ce soit l’initiative en tant que telle, rapidement dénoncée par un arc conservateur allant du MoDem Laurent Croizier au membres de « Némésis », ou le déroulé de l’évènement, discutable par l’invitation de collectifs aux dérapages notoires ou la reprise de slogans aux détournements mémoriels choquants, la critique de cette mobilisation était bien entendu possible.
Un biais que n’a pas manqué d’enfourcher « l’Est Républicain », mais en préférant la tribune partisane en lieu et place d’un compte-rendu factuel. « Importation du conflit », volonté « d’exacerber les tensions », prétendues sympathies pour la « République islamique d’Iran », concurrence victimaire avec les Rohingyas et les Ouïgours, renvois au « Hamas », s’enchaînent ainsi, sous la plume de Pierre Laurent, habitué des hagiographies pour écrivains racistes et autres interviews complaisantes de l’extrême droite. Une logorrhée directement empruntée au confidentiel « CRIF de Franche-Comté », reprise jusqu’au « Rassemblement National » qui évoque lui aussi une saillie « anti-Israël ».
L’adjectif n’est toutefois plus trouvable dans l’actuelle version en ligne de l’article, apparemment effacé en catimini. Mais celui-ci a quand même produit les effets escomptés, avec des répercussions notables. Selon nos informations, la présidente de région, Marie-Guite Dufay, à la lecture du pamphlet, a ainsi décidé de renoncer, unilatéralement, à l’adoption de vœux, un « appel pour Gaza », qui entendait exhorter à l’arrêt des massacres. Largement torpillée par le journaliste du « Crédit Mutuel », la résolution, qui devait être votée en assemblée plénière des 26 et 27 juin prochains, se voit désormais complètement enterrée, remplacée par un simple « débat ».
Et si le projet a déjà été ratifié par l’essentiel de la gauche, dont les trois groupes présents (« Notre Région par cœur », « Communistes et Républicains », « Écologistes et Solidaires »), le revirement surprise ne risque toutefois pas de faire couler beaucoup d’encre. Peu de prétendant·e·s devraient en effet se risquer à une fâcherie, alors que la boss apparaîtra pour son ultime séance après avoir annoncé une succession âprement disputée. Quant à savoir si des élu·e·s ou représentant·e·s désigné·e·s démocratiquement par et pour le peuple peuvent ainsi se voir privé·e·s de leur libre-arbitre à cause de l’opinion d’un individu qui ne représente que lui-même, la réflexion est lancée…
Photographie d’en-tête : Image d’illustration – Aperçu du cortège « pour une paix immédiate et durable en Palestine », le 4 novembre 2023 à Besançon.