Salah Gaham, vingt ans déjà

Alors que les révoltes urbaines consécutives à la mort de Nahel Merzouk sont encore dans toutes les têtes, ce 5 novembre c’est concernant les « émeutes de 2005 » que la ville de Besançon s’est arrêtée. Il y a vingt ans, dans la nuit du mercredi 2 au jeudi 3, les sous-sols d’un bâtiment de Planoise étaient en flammes, suite à l’incendie de véhicules. Bien des vies sont en jeu, le site accueillant nombre d’étudiant·e·s du « CLA », dont plusieurs se défenestreront pour échapper à la combustion. Un gardien d’immeuble, Salah Gaham, trente-quatre ans, originaire d’Annaba, n’hésites pas à se saisir d’un extincteur pour tenter de contenir le sinistre, mais s’effondre, intoxiqué par les fumées.

Aperçu du forum de Planoise, en 2010.

L’intervention de quatre-vingt pompiers du département permettra de limiter les dégâts, alors que le bilan se monte à un mort, deux blessé·e·s graves et quatorze personnes plus légèrement atteintes. La tragédie est survenue au moment où les soulèvements franciliens débutaient après l’électrocution de Bouna Traoré et Zyed Benna, mais l’émoi fut tel que, paradoxalement, elle limitera les échauffourées locales. Il faut dire, aussi, que ce calendrier précoce cache une réalité moins tapageuse que l’idée d’une insurrection. Car, rapidement, la police soupçonne l’œuvre d’un homme isolé à la retraite, porté sur la pyromanie, dont les motivations n’ont rien de contestataires.

Lors de l’hommage, élu·e·s du secteur, membres du conseil citoyen, représentant·e·s d’associations, tenaient à être présent·e·s et à témoigner.

Mais, depuis, l’enquête n’a jamais aboutie. Dès janvier 2006, l’espace attenant à cet évènement fut baptisé « square Salah Gaham ». Une volonté de rendre hommage à « sa mémoire, son courage, sa jeunesse ». Un devoir, que la municipalité a donc voulu de nouveau sacraliser par une cérémonie. Après deux décennies, le souvenir s’efface toutefois lentement… Le « forum » où s’est déroulée la catastrophe a été détruit en 2015, un projet de livre n’a pas vu le jour, la page « Wikipédia » sur cette histoire a été supprimée à la faveur d’un vote. Seuls les fondements socio-économiques de cette période sombre affrontent le temps, ainsi que les troubles de juin-juillet 2023 l’ont restitué.

La plaque commémorative, agrémentée de quelques fleurs.


Illustration d’en-tête : Aperçu de la plaque commémorative, le 24 mai 2024 – ArtyElAnanas/cc-zero.