Radicaux Du Doubs 3

Ce vendredi 17 mai le Ch’ni dressait le portrait de trois militants néonazis, dont la culpabilité vient d’être à nouveau confirmée en cour d’appel pour leur participation aux émeutes racistes de Romans-sur-Isère. Ces parcours, ancrages, environnements, avaient ainsi été succinctement brossés. Mais le cas de Romain J. nous a davantage intéressé, par ses attaches personnelles et familiales au sein de la section départementale du « Rassemblement National » (RN). Alors que le parti d’extrême-droite persiste à vanter sa dédiabolisation, les réalités s’avèrent souvent moins vendeuses sur le terrain.

Au sein du trio son rôle reste sans doute le plus délicat à assumer, puisque l’enquête rapportait procès-verbaux en tête qu’il avait attaqué des agents de police à coups de mortiers d’artifices. Ce « il » c’est Romain, militaire de vingt-deux ans et ultranationaliste assumé qui n’avait pas hésité à traverser la France pour s’adonner à une véritable ratonnade. L’ultime ligne d’un cursus déjà bien chargé, entre évolution au sein des « Vandal Besak », accusations de tabassage LGBTphobe et autres apparitions avec un drapeau du IIIe Reich. Une place au sein de la mouvance la plus radicale, qui ne doit peut-être rien au hasard.

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Le père, David, en compagnie de « ses vieux frères », Sébastien F. dit Sanglier et Olivier B., au centre et à droite, au restaurant, le 24 janvier 2024 – capture d’écran Facebook.

Ainsi dans la famille, on retrouve le père David ; un adhérent du RN, qui relaie ses collages d’affiches et rencontres avec les élu·e·s. Mais pas seulement, ses publications indiquant aussi des liens plus contestables. Comme le 22 janvier dernier en se photographiant avec Sébastien F. dit Sanglier et Olivier B., entrevue qualifiée de « retrouvailles avec ses vieux frères. » Le premier est un routard multi-condamné, qui s’était fait connaître lors du saccage de l’Arc de Triomphe fin 2018 ; le second un responsable de « Terre et Peuple », passant de l’organisation de fêtes Volkisch à l’agression d’un journaliste.

Un hybride entre radicalité et électoralisme, qui trouve sa vitrine la plus aboutie cette fois chez la grand-mère. En effet Monique ne fut autre que la suppléante d’un certain Thomas Lutz, cadre du parti et candidat aux dernières échéances législatives de 2022. Lequel a également été remarqué il y a quelques semaines pour son soutien au groupuscule identitaire « Némésis », ayant surtout employé le mot très connoté de « untermensch » – sous-homme – en plein conseil régional. Une sortie qui avait certes été officiellement regrettée par ses pairs, mais qui n’avait finalement entraîné aucune sanction.

Radicaux Du Doubs 2
Le 14 juillet 2023, toute la petite famille posait en bonne compagnie… de droite à gauche : David, le père ; Émeric Salmon, député de Haute-Saône ; Géraldine Grangier, députée du Doubs ; Monique, la grand-mère ; Romain, récemment condamné pour sa participation aux émeutes racistes de Romans-sur-Isère ; Antoine Villedieu, député de Haute-Saône – capture d’écran Facebook.

Un attrait pour les dérapages qui semble partagé dans les rangs, les trois générations qui nous intéressent oscillant entre adhésion aux fake-news, blagues xénophobes et ironies sur des munitions « spéciales migrations » à travers leurs réseaux sociaux. Mais pour marquer encore cette belle alchimie, toutes les branches ne pouvaient pas mieux faire que de s’immortaliser avec les plus importantes références lepénistes du moment… Julien Odoul le 26 juillet 2020, Jordan Bardella le 25 novembre 2023, Steven Fasquelle le 11 mai 2024, concrétisent une liste de contacts qui comprend tout ce que le secteur compte d’activistes.

La collection de clichés s’illumine définitivement le 14 juillet 2023, lorsque Romain, David et Monique paradent tout sourire avec « [leurs] député·e·s » Géraldine Grangier, Antoine Villedieu et Émeric Salmon. Une énième proximité devenue fâcheuse chez ces parlementaires, dont l’entourage regorge de profils peu enviables y compris jusqu’à leurs assistant·e·s au moins concernant le titulaire de la deuxième circonscription de Haute-Saône. Ou comment relativiser fortement les promesses de normalisation, quelques recherches et recoupements permettant de voir au-delà du vernis tapageur.

Illustration d’en-tête : le père, David, collant une affiche électorale, pour le compte de Thomas Lutz, alors candidat aux législatives de 2023 dans la première circonscription du Doubs, le 11 juin 2022 à la veille du scrutin, dans son village près de Besançon – capture d’écran Facebook.